Quand le Val de Vôge a décidé qu'il ne voulait pas mourir
20 Février 2019
C'est officiel, il l'a annoncé dans son interview au journal La Croix " Une guinguette abandonnée doit devenir une micro-brasserie"
Il, c'est bien entendu Michel Fournier qui fait cette annonce. La Guinguette abandonnée, c'est bien sûr la Guinguette, celle de la Mère Guinguette, celle où Pierre Olivier avait installé avec Aurélie leur atelier de fabrication de yourtes.
Et la micro-brasserie c'est celle qui va servir la plus gouleyante, la plus rafraîchissante, la plus Voivraise des bières locales.
En fait cette installation ne fera que concrétiser un rêve vieux de presque maintenant 30 ans, quand Michel Fournier alors jeune élu, la tête pleine de millions de projets pour sauver et dynamiser Les Voivres avait voulu créer des emplois en faisant revivre une production vosgienne traditionnelle qui n'était plus réalisée dans le département : la bière.
Le dernier site, Les Grandes brasseries de Charmes après avoir fusionné en 1966 avec la brasserie de Champigneulles, donnant naissance à la Société européenne de brasserie (S.E.B), avait fermé en 1971.
Un premier contact est pris avec le dernier directeur de la brasserie de Ville sur Illon qui, dans le cadre du musée de la bière installé là depuis la fermeture, brassait de nouveau artisanalement à l'occasion de journées portes ouvertes.
Pour lui, vouloir implanter une nouvelle brasserie n'était pas possible étant donné l'importance des investissements nécessaires et l’impossibilité de concurrencer les géants de la bière.
Par contre il conseilla une nouvelle formule qui se développait depuis quelques années : la micro-brasserie. On ne parlait plus de brasser des millions, ni même quelques dizaines de milliers de litres de bière mais seulement quelques hectolitres à la fois. Le plus souvent cette bière n'était pas pasteurisée, ni même embouteillée mais était destinée à être consommée sur place.
Étant partis à la fin de notre rendez-vous avec l'adresse de l'institut de la bière de Nancy, une visite sur place confirma ses dires. L'institut commercialisait même des installations clé en main.
Tout se présentait bien à part un petit rien, une broutille. Si installer une micro-brasserie et produire une bonne bière Made In Les Voivres était réalisable, encore fallait-il la vendre cette bière. Même avec la meilleure volonté du monde il était difficile de demander aux habitants de la commune de la boire à eux seuls.
Il avait donc été envisagé d'adjoindre à l'unité de production un grand bâtiment de 1500 ou 2000 mètres². Celui-ci aurait été installé aux Bouleaux sur la zone Aménagée nouvellement créée mais encore en friche. L'emplacement aurait eu deux avantages. Il était situé au bord de la grand route très passante et il aurait été possible d'utiliser directement l'eau de la source alimentant le château d'eau avant qu'elle ne soit traitée.
De nombreux contacts avaient été pris pour remplir cette structure, sinon tous les jours au moins tous les week-end et quelquefois quelques heures dans la semaine. C'est ainsi que plusieurs personnes, sociétés ou associations étaient prêtes à s'investir dans ce projet.
Ainsi Vosges Terroir était d'accord pour organiser un marché hebdomadaire de produits locaux, la radio locale de Gérardmer qui voulait étendre son audience sur la plaine souhaitait installer un relais sur les hauts de La Chapelle aux Bois. Une jeune société d'animation proposait ses services et son carnet d'adresses pour organiser spectacles, concerts ou bals.
Et le plus enthousiaste de tous était un jeune lycéen qui commençait de monter des spectacles sons et lumières et voulait créer son entreprise. Il s'appelait Damien Fontaine. Sa société emploie actuellement des dizaines de personnes. Elle a organisé les sons et lumières de la foire internationale de Shanghai et de la Fête des Lumières à Lyon. Tout comme pour Michel Fournier dont ce projet qui a capoté est le plus grand regret, on se les bouffe en pensant à ces opportunités qui nous ont échappé.
Sans doute était-il trop tôt. Quelques années plus tard le bulldozer Fournier aurait tourné à pleine puissance et aurait pu finaliser ce projet. Quelques années plus tard, le conseil municipal n'aurait pas été divisé entre les tenants de celui-ci et d'irréductibles opposants. Quelques années plus tard le concept de micro-brasserie aurait été mieux accepté.
Quoiqu'il en soit si cette réalisation n'a pas abouti, elle a permis de faire une publicité énorme et gratuite autour de Les Voivres et de sa Zone Aménagée et de nouer de nombreux contacts.
On se doute bien que 30 ans plus tard, quand un brasseur a poussé la porte de la mairie en disant qu'il voulait s'installer à Les Voivres, il a été accueilli à bras ouverts.