Quand le Val de Vôge a décidé qu'il ne voulait pas mourir
18 Avril 2017
"-Bonjour, je peux photographier vos fleurs ?
-Elles ne sont pas bien belles cette année.
-Mais si, je ne parlais pas des plantes en pot mais des arbustes et des fleurs de votre jardin.
-Oui c'est vrai, surtout les primevères."
Il n'y a pas là de plantes exotiques, seulement des arbustes et des fleurs de notre région : forsythia, myosotis, tulipes ... et ces fameuses primevères qui sont effectivement belles cette année.
Ce n'est qu'un petit jardin comme il y en a beaucoup, réservé à la consommation familiale.
Il est cependant bien assez grand pour laisser une large place à ces fleurs et à ces arbustes d'ornement. A plusieurs endroits de la commune, jouxtant des maisons en ruines, ceux-ci se dressent encore au milieu de taillis de ronces et d'orties. On les remarque en cette saison, bien repérables grâce à leurs fleurs.
Souvent on voit aussi un buis, un seul, quelquefois haut de plusieurs mètres, le buis des Rameaux. Celui qui n'en avait pas dans son jardin allait en chercher chez le voisin.
A cette époque un massif de fleurs, un arbuste n'était pas considéré comme prenant la place d'une planche de salades ou de quelques pieds de pommes de terre. Le plaisir de l’œil, le respect des traditions étaient aussi important que d'engranger une récolte.
En fait, sans vraiment qu'il le sache, les mètres carrés perdus par le jardinier étaient compensés par un meilleur rendement du potager. Les insectes attirés par ces fleurs pollinisaient les légumes. Les arbres ombraient et servaient de brise-vent, les ravageurs ne se précipitaient pas en masse sur votre récolte car il n'avaient que l’embarras du choix entre les diverses plantes. De même leurs prédateurs trouvaient là, refuge et nourriture.
Maintenant nous savons parfaitement comment fonctionnent ces écosystèmes. Les bénéfices que le jardinier et le cultivateur peuvent en tirer ont été étudiés, analysés sous toutes les coutures. Ces études ont été largement vulgarisées.
Or nous n'avons jamais mis autant d'acharnement à détruire notre environnement, nous n'avons jamais employé autant de moyens sur la terre entière, pour le faire au nom de bilans équilibrés, de trésorerie saine et d'actionnaires repus.
Sur la commune, il n'y aura pas un pour cent, des arbres, haies, arbustes, abattus dans le cadre de l'aménagement foncier qui seront remplacés tout de suite par de nouvelles plantations. Que ceux-ci gênent avec le nouveau découpage des parcelles, c'est évident. Ce n'est pas l'abattage d'un arbre qui est grave. C'est le fait de ne voir dans cet arbre qu'une perte de terre agricole occasionnant un manque à gagner. C'est nier son utilité.
Pourtant la dernière alerte date de deux ans seulement. En 2015, début juillet, quelques jours de simoun ont fait plus de dégâts sur les cultures que 3 mois de sécheresse en 76. Au mois d'octobre beaucoup d’exploitants accusaient une perte de 50 % sur leurs récoltes de maïs.
Sur les plans des nouvelles parcelles, des haies sont prévues. Il faut espérer qu'elles seront mises rapidement en place.
Planter des haies, planter des arbres, c'est prendre une assurance pour que les plantes cultivées par l'homme ne se retrouvent pas régulièrement exposées en première ligne sous les assauts des ravageurs et des maladies. C'est aussi la seule façon de se protéger à l'avenir de ces vents violents, brulants ou glacés, qui sèchent les récoltes sur pied.
A moins que d'aller semer son blé et son maïs en Sibérie ou en Scandinavie comme certains se préparent à le faire.
A un lilas
Je vois fleurir, assis à ma fenêtre,
L'humble lilas de mon petit jardin,
Et son subtil arome qui pénètre
Vient jusqu'à moi dans le vent du matin.
Mais je suis plein d'une colère injuste,
Car ma maîtresse a cessé de m'aimer,
Et je reproche à l'innocent arbuste
D'épanouir ses fleurs et d'embaumer.
Tout enivré de soleil et de brise,
Ce favori radieux du printemps,
Pourquoi fait-il à mon cœur qui se brise
Monter ainsi ses parfums insultants ?
Ne sait-il pas que j'ai cueilli pour elle
Les seuls rameaux dont il soit éclairci ?
Est-ce pour lui chose si naturelle
Qu'en plein avril elle me laisse ainsi ?
– Mais non, j'ai tort, car j'aime ma souffrance.
A nos amours jadis tu te mêlas ;
Au jardin vert, couleur de l'espérance,
Fleuris longtemps, frêle et charmant lilas !
Les doux matins qu'embaume ton haleine,
Les clairs matins du printemps sont si courts !
Laisse-moi croire, encore une semaine,
Qu'on ne m'a pas délaissé pour toujours.
Et si, malgré mes espoirs pleins d'alarmes,
Je ne dois plus avoir la volupté
De reposer mes yeux brûlés de larmes
Sur la fraîcheur de sa robe d'été ;
Si je ne dois plus revoir l'infidèle,
J'y penserai, tant que tu voudras bien,
Devant ces fleurs qui me virent près d'elle,
Dans ce parfum qui rappelle le sien.