Quand le Val de Vôge a décidé qu'il ne voulait pas mourir
14 Novembre 2015
Après la célébration de la messe, Mr Michel Georges de l'association U.N.C.-A.F.N. de la Chapele aux Bois rappelle dans quel ordre se déroulera la cérémonie commémorative du 11 novembre 1918 devant le monument aux morts :
- Garde à vous, lever des couleurs
- Appel aux morts par les enfants
- Dépôt de gerbe par les enfants
- Sonnerie aux mort
- Minute de silence
- Marseillaise chantée par les enfants
- Lecture du message de M. Jean-Marc Todeschini, secrétaire d’Etat auprès du ministre de la défense, chargé des anciens combattants et de la mémoire.
Etaient présents à cette cérémonie : Mme Véronique Marcot, Maire de Xertigny, conseillère départementale, Mr Benoit Aubry, maire de La Chapelle aux Bois, Monsieur Michel Fournier, Maire de Les Voivres, président de la Communauté de communes du Val de Vôge, la gendarmerie nationale, les sapeurs pompiers , les anciens combattants, la clique de Xertigny
De nombreuses personnes étaient venues, qui pour beaucoup avaient déjà participé à la cérémonie à Les Voivres.
Toute l'assemblée a ensuite suivie la clique qui joua plusieurs morceaux devant la salle des Fêtes.
Puis tous assistent au spectacle donné par les enfants des écoles présenté par leur directrice.
Ils avaient travaillé sur l'album " Lettres à Lulu" le récit fait par une petite fille dont le grand frère a 22 ans. Il vient de finir ses 3 années de service militaire. Il est mobilisé le 2 aout 1914 alors que tout le village préparait la fête. Il reviendra mutilé de guerre à la maison.
Les élèves du CM1 lisent la partie narrative tandis que les plus grands récitent les dialogues.
Cette mise en scène, très sobre rendait compte des événements, de la vie des familles dans un village pendant la guerre, avec une grande force en particulier l'arrivée du facteur et du maire porteurs des faire parts de mort et le moment où la fillette découvre les blessures de son frère.
M. Jackie Pierre, sénateur des Vosges assistait à ce spectacle. Comme le dit, entre autre, l'écrivain Jorge Semprun, ancien déporté :
"- Seul l'art peut permettre de raconter ce qui n'est pas racontable."
Pour cette raison j'avais choisi d'écrire un petit article de fiction sur les tués et leurs familles pendant cette guerre. Ce même thème a été préparé par les enfants de l'école et leurs institutrices.
Je dois avouer que mon écrit me semblait un peu fade à côté de ce que je voyais sur cette scène.
Tous les deux aidaient à préparer la Saint-Julien. Saint-Julien, c’était le nom du
village, et c’est le 2 août que tombe la Saint-Julien. Alors, ce jour-là, tout le monde faisait la fête.
" Le tocsin! a crié Charles. Ça veut dire qu’il y a eu une catastrophe ! "
Charles prit alors Lulu par les épaules et lui dit ces quelques mots:
"-Je vais devoir partir, ma Lulu. Je vais aller me battre contre les Allemands...
-Te battre? Mais... La fête de la Saint-Julien?
-Il n’y aura pas de fête cette année, ma Lulu...C’est la guerre."
"-Tu m'écriras
-Oui, sœurette! je t’enverrai de jolies lettres, juste pour toi, avec ton nom dessus!
Malgré son air joyeux, elle sentait bien qu’il n’avait aucune envie de partir. Une voix a crié
: "En voiture!"
Charles prit Lulu dans ses bras, lui fit deux grosses bises, puis la reposa sur le quai
Les journaux disaient aussi que les Allemands seraient bientôt battus, que la guerre ne durerait pas, que l’armée serait à Berlin avant l’automne.
A l’intérieur, il y avait plusieurs feuilles pliées en deux. Sur l’une d'elle, on pouvait lire: "Pour Lulu"
La petite fille arracha pratiquement des mains de sa mère le précieux feuillet et fila au grenier pour le lire. Bien assise dans le foin, elle déplia le rectangle de papier.
Blanche était la femme du Félix, le meunier. Tout le monde la connaissait.
C’était une fille du pays. Elle s’occupait de la troupe de théâtre qui animait les nombreuses fêtes des environs.
Ce jour de février 1915, le facteur vint chez elle avec une enveloppe bleue. Le maire l’accompagnait. Ils lui dirent quelques mots à voix basse, et soudain, Blanche éclata en sanglot. Toutes les femmes du village accoururent. La lettre disait à Blanche que, quelque part en Lorraine, dans une forêt de sapins, son Félix avait été tué par une balle de fusil.
Elle était la première du village à recevoir une nouvelle de ce genre.
Hélas, d’autres ont suivi, beaucoup d’autres... La liste s’est allongée: Bastien, le fils du menuisier, Léopold le mari de madame Ferrand, la maîtresse de l’école communale, Etienne Bourreau qui laissait trois orphelins. Peu à peu, les vêtements noirs se sont multipliés dans le village
Les hommes tombaient par milliers et il (le maire) ne voulait pas le dire aux gens de Saint-Julien
Elle savait bien que beaucoup de gens étaient morts durant ces quatre années qu’avait duré la guerre et qu’elle avait de la chance que son frère soit vivant.
Des amis de Charles, seul Martin était revenu entier des tranchées ; Ambroise et Célestin manqueraient pour toujours à leurs familles. Pourtant, certains soirs, elle saisissait les poignées du fauteuil et ils montaient tous les deux sur la colline derrière le village pour voir le soleil se coucher sur les champs de blé. Et là, le regard perdu vers l’horizon, ils songeaient à tout ce qu’ils ne pourraient plus jamais faire ensemble.
Lettres à Lulu