Quand le Val de Vôge a décidé qu'il ne voulait pas mourir
31 Octobre 2015
Il y a des jours comme çà. Le temps s'éclaircit, on sent qu'il fera beau.
Malgré les gros nuages qui se pressent encore, la lumière est belle. Il faut partir à la rencontre de l'automne en s'arrêtant souvent pour tout regarder, pour tout enregistrer.
Près de la Guinguette et autour de l'Etang Lallemand c'est encore plus beau! Les fées, les nixes nicettes d'Apollinaire ont travaillé d'arrache-pied répandant l'or et l'émeraude, la rouille, le vieux cuivre et le pourpre
Il faut tout voir, tout engranger, ne pas oublier la branche au dessus du chemin et le roseau qui flambe dans l'eau.
Et les yourtes serties dans un écrin doré, au pied des arbres en feu.
Correspondances
La Nature est un temple où de vivants piliers
Laissent parfois sortir de confuses paroles;
L’homme y passe à travers des forêts de symboles
Qui l’observent avec des regards familiers.
Comme de longs échos qui de loin se confondent
Dans une ténébreuse et profonde unité,
Vaste comme la nuit et comme la clarté,
Les parfums, les couleurs et les sons se répondent.
II est des parfums frais comme des chairs d’enfants,
Doux comme les hautbois, verts comme les prairies,
— Et d’autres, corrompus, riches et triomphants,
Ayant l’expansion des choses infinies,
Comme l’ambre, le musc, le benjoin et l’encens,
Qui chantent les transports de l’esprit et des sens.
Charles Baudelaire, Les Fleurs du mal
Ce soir, c'est à la rencontre d'amis que nous allons. Ceux qui habitent là, ceux qui viennent d'arriver pour donner un concert ou qui seront là pour les écouter
Ce soir, nous retrouverons Pierre-Olivier. Il fera bon sous la yourte. Le feu va chanter dans le poële, le feu va rapprocher. Hêtre Nomade nous parlera de leurs projets, du voyage qu'ils envisagent de faire en Géorgie. Il goûtera notre pain et nous versera sa soupe épaisse. Il a rencontré ses invités, Yoko et Ludovic, cet été dans le pays de Loire. Ceux-ci viennent de sortir leur album " Le Sentier et l'Estuaire ". En ce moment ils parcourent la France, le jeudi ici, le vendredi à Saint-Etiennne les Remiremont (88) le samedi à Erstein (67 ).
Après ils seront loin mais resteront parmi nous.
Grâce à leur réseau internet de rencontres ils vont de place en place, d'amis en connaissances pour donner leurs concerts, invités d'un jour et depuis longtemps des amis, ceux pour lequel la porte ne ferme jamais bien.
Ce soir il est chaud sous la yourte. Ce soir ils arrivent, écouter le violon de Yoko, et Ludovic chanter. Ce soir, viennent leurs pas, leurs bras qui demain forgeront ailleurs.
In Bô sont là, Aurèle et Antoine, entre deux montures de lunettes, celui-ci a pris le temps de mettre une tarte au four. Ils ont toujours tout leur temps pour t'écouter.
Voici, Florel et Lisa, puis les autres qui entrent. Eux aussi sont ployés par tout ce qu'ils emmènent et vont re emporter.
Le Songe de la Montagne
À l'horizon des songes, le feu sur la montagne
Qui vient dans ton sommeil arracher les volets
De ta maison couchée dans la nuit buissonnière
L'éclair s'est glissé, il brille dans tes veines
Au jour qui s'approche tu sais qu'on t'a montré
La route qui s'efface à ceux empoisonnés
Seule la lumière peut te porter vers les traces
De ceux qui sont partis pour allumer demain
...
Ludovic B.A. : chants, guitares, textes
Yoko Takeda : violon
Ludovic nous chante les méandres d'un homme que son destin a rattrapé, que ses démons ont usé. Il conte cette fin qui sera peut-être un nouveau départ pour les autres membres de la famille.Toutes ses chansons évoquent les hommes qu'ils ont croisés, ceux avec qui ils ont marché.
Ceux qu'ils ne connaissent pas encore mais qui les attendent. Ceux qu'ils va confier aux sons de sa guitare, que le violon va pleurer pour garder souvenance.
L'Estuaire
Dans tes yeux les reflets de l'eau
Tu rayonnes, je ne vois que toi
Tu dis que tu cherches l'estuaire
Mais derrière tu me dis tout bas
Te souviens-tu de moi, des promesses données,
De la première fois ?
Quand seul et perdu tu te donnais à mes yeux
Sans même faire un choix
Sur ce chemin de pierre au soleil
Ta présence me donne le La
Comme toi je file vers l'estuaire
Où l'horizon vient rêver si bas
Où la terre s'efface imbibée de couleurs
Est comme un buvard
Où la mémoire s'éclaire aux jeux des reflets
Oui je me souviens
Tes yeux d'eau claire
Mais je ne sais plus
Ni le temps ni les lieux
....
Ludovic B.A. : chants, guitare, texte
Yoko Takeda : violon
Avec Pierre-Olivier nous parlons de la Géorgie, d'un livre sur Attila, du Caucase d'où sont peut-être venus les basques dont Ludovic interprète une chanson.
" J'avais un amoureux,
C'était un oiseau.
Je voulais lui couper les ailes
Pour le garder auprès de moi
... "
Il nous demande de reprendre le refrain.
Nous évoquons aussi Attila et les brassages de populations nécessaires pour maintenir la vitalité des civilisations. Si elles se replient sur elles-mêmes, elles meurent.
Est ce une coïncidence, mais dans le groupe tous vont vers les autres pour exercer leur activités ?
Ce soir Florel évoque avec Yoko et Ludovic les festivals auxquels il est nécessaire de participer pour ce faire connaître. Refuser d'aller à la rencontre des autres ou ne pas vouloir les recevoir, c'est ce condamner à mourir.
Ce soir je parle boutique avec Sullian. Comme moi, il pense qu'il faut aimer les hommes que l'on photographie, que ceux-ci doivent aimer ce qu'ils font, pour avoir une belle photo, pour tomber dans leurs âmes.
I see the beauty of people and the human soul in the pictures I take
G.M.B. Akash
Bien avant les Huns, d'autres peuples sont partis de l'Asie. Ils ont gagné l'Amérique où ils se sont installés.
L'arrivée des blancs les a presque fait disparaître.
Yoko et Ludovic ont rencontré une réalisatrice qui a fait un film sur une réserve où certains vivent maintenant : espérance de vie 45 ans. Certains jeunes veulent cependant essayer de se reprendre en main.
Pourront-ils y arriver ?
Et toi arriveras tu à bâtir des rêves, à partir là bas où il n'y a plus de liens ?
Où impossible est toujours conjugué à l'imparfait.
Eux le feraient, eux le font, ils ont déjà franchi la porte. Tes pieds sont-ils si lourds que tu ne puisse les suivre ?
Les baies sauvages
Il nous faut cesser de parler aux miroirs
Si l'on veut que la grâce ranime notre histoire,
Tous les matins nous disent de nous ressaisir
Alors je prends ta main je veux t'emmener cueillir
Allons manger les baies sauvages
S'il faut ranimer dans nos corps le feu du désir
Allons manger les baies sauvages
Et nous saurons si dans nos cœurs l'ardeur du désir
Sort du calice
....
Ludovic B.A. : chants, guitare, texte
Yoko Takeda : violon
Ludovic chante René Char. Lui aussi est amoureux de poésie comme beaucoup de lecteurs qui régulièrement signalent qu'un poème partagé pour illustrer un article leurs a plu.
La poésie est écrite pour tous, c'est l'affaire de tous. Il ne faut pas la laisser à une élite qui va l'étouffer sous un jargon technique. C'est la plus ancienne forme de communication. Les poètes aveugles déclamant l'Iliade étaient la mémoire de la Grèce antique.
En France, on parlait des récitations, ne gardant que cette fonction de la poésie, lui ôtant toute sa beauté. Il semble que cette époque ait changé.
Dans beaucoup de pays c'est un art majeur. Les soldats de l'Armée Rouge partaient pour la Grande Guerre Patriotique avec des recueils de poèmes dans leur havresac.
La poésie appartient à la rue. Elle n'a pas besoin d'être expliquée ou apprise.
Elle est l'homme qui crée. Elle est celui qui lutte.
Invitation
J'appelle les amours qui roués et suivis par la faulx de l'été, au soir embaument l'air de leur blanche inaction.
Il n'y a plus de cauchemar, douce insomnie perpétuelle.
Il n'y a plus d'aversion.
Que la pause d'un bal dont l'entrée est partout dans les nuées du ciel.
Je viens avant la rumeur des fontaines, au final du tailleur de pierre.
Sur ma lyre mille ans pèsent moins qu'un mort.
J'appelle les amants.
©Tout droits réservés : Ludovic B.A Lyra: musique
Editions gallimard 1961 : Invitation, Poème de René Char
René Char, celui qui a résisté, celui qui a crié, qui s'est révolté.
Nous sommes sous la yourte et Ludovic nous conte la steppe. Celle qui s'étend sur des milliers de kilomètres, avec son climat continental rude.
Celle qu'à parcouru la Horde d'Or, Attila et toutes ces civilisations de peuples libres et guerriers qui faisaient trembler les sédentaires et vaciller leurs empires.
Celle qui s'étend sur 10 000 km de l'Asie à la puszta hongroise, celle des peuples nomades;
" Nomados " du grec qui changent de pâturages.
Pierre-Olivier a dit son envie de partir en voyage, Yoko et Ludovic font leurs tournée en France, Lisa, Florel, Pascal vont de festivals en fêtes pour présenter leurs produits.
Gauthier monte des animations, des spectacles.
In Bô multiplie les salons, les expositions.
Eux aussi sont des nomades.
Ce ne sont pas des nouveaux pâturages qu'ils cherchent; Ce sont des Hommes.
Ludovic B.A : Chant, guitare, texte
Yöko Takeda : Violon
Sur la Steppe
Sur la steppe immense éclatée par les jours
Dans le frisson des roches qui se dressent vers le ciel
À sa voûte qui s'épanche dans une douceur de rêves qui s'éteint
Il divague en cherchant son visage oublié
Dans les reflets brisés de l'eau où la lumière tombe
Il se penche pour s'abreuver du murmure de l'aube
......Ludovic B.A : Chant, guitare, texte
Yöko Takeda : Violon
Stream Ludovic B.A et Yöko Takeda - Playlist extraite du premier album " le sentier et l'estuaire ", a playlist by Ludovic B.A from desktop or your mobile device
https://soundcloud.com/ludovicba1/sets/ludovic-b-a-et-y-ko-takeda
Un violon, une guitare, deux âmes chantent leurs amis, racontent leurs chemins.
"- Tu nous feras un compte rendu a demandé Pierre-Olivier. "
Sauf que, en temps normal j'ai déjà du mal pour deviner ce que j'ai pu gribouiller".
Sauf qu'ils on éteint les lumières.
"- Je vais allumer des bougies a dit Aurélie.
- Au secours ! Il fait tout noir. "
Alors je ne sais plus ce que j'ai écrit, j'ai mélangé tout ce que j'ai entendu.
Je sais quand même qu'ils ont chanté leurs amis.
.
Tous leurs amis.